L’histoire du mont Royal

Découvrez pourquoi le mont Royal, cette petite montagne au cœur de Montréal, occupe une si grande place dans l’histoire de notre ville, notre patrimoine et notre identité.

Vers 3000 av. J.-C.

Formée lorsque les glaciers se sont retirés il y a des millénaires, la montagne est, en fait, une série de trois collines alignées.

Sa masse imposante au centre de l’île, ses points de vue sur le fleuve et ses forêts majestueuses en faisaient un site incontournable pour les peuples autochtones de passage dans la région. La montagne était source de cornéenne, une pierre aux bords tranchants utilisée à défaut de silex pour la fabrication d’outils et d’armes nécessaires à la chasse.

Au fil du temps, le bois de la montagne aurait servi à la construction de villages et ses terres fertiles à la culture des trois sœurs de l’alimentation autochtone, soit le maïs, la courge et le haricot.

Comme tant d’autres montagnes, le mont Royal était sans doute un lieu d’une grande importance dans le paysage culturel et sacré du peuple autochtone.

1535 : Jacques Cartier déclare la montagne royale

Lors de son deuxième voyage au Nouveau Monde, Jacques Cartier remonte le fleuve Saint-Laurent et est accueilli par les autochtones du village de Hochelaga qui l'emmènent gravir la montagne, tout proche, couverte de bois magnifiques et offrant des points de vue impressionnants.

Devant la beauté du paysage, ou peut-être en l'honneur de son roi, Jacques Cartier nomme cette montagne « mont Royal ».

1643 : une croix sur le mont Royal

Le 24 décembre 1642, la colonie de Ville-Marie est sous le déluge. Craignant une inondation par les eaux montantes du Saint-Laurent, Paul de Chomedey, sieur de Maisonneuve, prie à la Sainte Vierge, lui promettant une croix sur la montagne si elle les épargne.

Ses prières étant exaucées, Maisonneuve porte sa croix en bois sur les épaules jusqu’au mont Royal dès les premiers jours de janvier.

1821 : le mont Royal, haut lieu de savoir

Montréal grandit à vue d’œil et sa population florissante gagne les campagnes environnantes.

La montagne, riche en terres fertiles et paysages bucoliques, attire de richissimes hommes d’affaires, tel James McGill, souhaitant cultiver ses terres, jouir de ses panoramas et respirer son air frais. Ayant lui-même fréquenté l’University of Glasgow, ce commerçant d’origine écossaise déplore le manque d’institutions d’enseignement à Montréal et, à sa mort, lègue son domaine sur la montagne pour en faire une grande école.

En 1821, l’Université McGill voit le jour sur la montagne, devenant ainsi une des premières institutions universitaires au Canada.

La culture du savoir s’enracine sur le mont Royal alors que le Collège de Montréal s’installe sur la rue Sherbrooke Ouest en 1870 et le Collège Notre-Dame sur la Côte-des-Neiges en 1881. L’Université de Montréal, quant à elle, inaugure son nouveau campus sur la montagne en 1943.

1852 : la montagne, en route vers le ciel

Dans cette ville devenue métropole du Canada, une question se fait pressante : que faire avec toutes les bonnes gens lorsqu’ils passent de vie à trépas?

Par souci d’hygiène et manque d’espace, on décide d’enterrer les dépouilles loin du centre urbain dans de grands cimetières à même la montagne. Dès 1852, le Mount Royal Cemetery accueille les âmes anglophones protestantes dans un magnifique aménagement paysager propre aux cimetières jardins de l’époque.

Établi en 1854, le cimetière catholique Notre-Dame-des-Neiges évoque l’esprit classique et le goût de la nature dans un style français inspiré par celui du Père-Lachaise à Paris. Aujourd’hui, il s’agit du plus grand cimetière au Canada.

La population juive se tourne elle aussi vers le mont Royal pour y enterrer ses morts : en 1854, on établit le cimetière Shearith Israël (cimetière de la synagogue des Espagnols et des Portugais) puis, en 1863, le cimetière Shaar Hashomayim.

Cette nouvelle vocation de site funéraire permet ainsi à une partie du mont Royal d’éviter l’urbanisation.

 

Cimetière préhistorique

L’histoire nous révèle que le mont Royal aurait aussi servi de site funéraire pour les populations autochtones préhistoriques. La mise au jour de plusieurs sépultures autochtones à divers endroits du mont Royal témoigne sans contredit de l’importance et de la valeur sacrée qu’auraient accordée à la montagne les peuples autochtones habitant l’île de Montréal.

1861 : le mont Royal, synonyme de santé

Alors que la révolution industrielle bat son plein, les habitants de Montréal font face à la pollution, au manque d’hygiène et aux épidémies.

Le mouvement hygiéniste de l’époque préconise un retour à la nature pour contrer l’insalubrité et la propagation de maladies. On souhaite soigner les malades à l’extérieur de la ville, loin du bruit et de la malpropreté, en créant des hôpitaux munis de parcs et de sentiers où l’air frais revigore. Le mont Royal s’offre comme terre de repos et de guérison.

En 1861, l’Hôtel-Dieu de Montréal quitte son emplacement dans le Vieux-Montréal pour devenir le premier hôpital à s’installer à flanc de montagne. Ensuite, c’est au tour de l’Hôpital Royal Victoria (1893) et du Shriners Hospital for Children (1925) d’investir le mont Royal afin de profiter de la valeur thérapeutique de la nature.

1876 : création du parc du Mont-Royal

Montréal s’impose comme ville industrielle et commerçante avec ses grandes fortunes, ses quartiers ouvriers et son port. Au milieu de tout ceci, la montagne. Toujours majestueuse, mais déjà fragile.

Certains sont d’avis qu’il faut la préserver et l’offrir aux Montréalais comme lieu de nature, de beauté et de bien-être; bref, en faire un grand parc. En 1859, les positions en faveur de la création d’un parc sur le mont Royal se cristallisent lorsqu’un propriétaire procède à l’abattage des arbres sur son vaste terrain, rue Peel, en périphérie de la montagne, en vue de les vendre comme bois de chauffage.

La décision est prise et bénéficie de l’appui de la collectivité: il y aura un parc sur la montagne.

Dès 1872, la Ville de Montréal entame les expropriations nécessaires pour acquérir les terrains du futur parc. En 1874, Frederick Law Olmsted, architecte paysagiste de renom, est engagé pour en réaliser les plans.

Le 24 mai 1876, l'inauguration du parc du Mont-Royal attire un grand nombre de citoyens. Même si peu d'aménagements ont été réalisés et que l'on note certains écarts avec le plan d'Olmsted, une certitude se dessine: le parc sera un site très populaire.

1904 : le sacré à flanc de montagne

Quelques années suivant leur arrivée à Montréal en 1657, les Sulpiciens, d’ores et déjà seigneurs de l’île, fondent une mission pour convertir au catholicisme diverses populations autochtones – Iroquois, Hurons et Algonquins – dans un grand domaine sis versant sud du mont Royal. Dès le XVIIIe siècle, le domaine de la montagne, tel qu’on le surnomme, devient la maison de campagne bien-aimée des prêtres.

Le mont Royal inspire plusieurs autres congrégations à s’y implanter, telles les Religieuses Hospitalières de Saint-Joseph, les Sœurs des Saints Noms de Jésus et de Marie et les Sœurs Missionnaires de l’Immaculée-Conception.

Autre grand site emblématique de Montréal, l’Oratoire Saint-Joseph façonne le paysage architectural et patrimonial du mont Royal depuis le début du XXe siècle.

À l’origine, il s’agit d’une petite chapelle à flanc de montagne érigée en l’honneur de Saint Joseph par le Frère André en 1904. La dévotion du célèbre frère guérisseur attirant un nombre grandissant de fidèles, ce lieu de prière se bâtit au fil des décennies – crypte, basilique et chapelle votive – pour devenir l’Oratoire tel qu’on le connaît aujourd’hui, en 1967.

1924 : une croix illumine la ville

C’est à la Société Saint-Jean-Baptiste que l’on doit la croix s’élevant aujourd’hui sur le mont Royal. En 1874, l’organisation émet le souhait d’aménager une croix sur la montagne en souvenir de celle érigée par De Maisonneuve au XVIIe siècle. Ce n’est que plusieurs années plus tard, en 1924, qu’elle gagne son pari grâce à une grande collecte de fonds menée auprès du public québécois.

Dessinée par un prêtre sulpicien (Pierre Dupaigne), la croix illuminée s'élève à une hauteur de 30 m depuis le sommet du mont Royal.

2005 : un nouveau statut de protection pour la montagne

En vertu de la Loi sur les biens culturels, le mont Royal devient arrondissement historique et naturel, en 2005, une première au Québec. Par ce double statut, le gouvernement du Québec entend protéger et favoriser le développement harmonieux de cet ensemble unique en raison des valeurs patrimoniales culturelles, historiques, architecturales, paysagères et naturelles que lui reconnaît la société.

Aujourd’hui, l’arrondissement est reconnu comme site patrimonial par le gouvernement du Québec. Une grande partie de la montagne jouit ainsi de mesures de protection qui encadrent l’aménagement et l’embellissement de ses espaces et bâtiments,  au grand bonheur des Montréalais et des visiteurs.

Créée en 2005, la Table de concertation du Mont-Royal (TCMR) rassemble plusieurs acteurs concernés par l’avenir de la montagne, dont des représentants des milieux institutionnel, associatif, gouvernemental et municipal.

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